Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/335

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Et un souvenir qui ne remontait pas à quatre heures lui revenant :

— Voilà donc, pensa-t-il, la cause du bruit qu’avait entendu ce pauvre baron dans la chambre à côté !… Et moi qui lui disais : « Bast ! c’est les rats ! »

Cependant il songea qu’il avait un moyen simple de vérifier l’exactitude de ses conjectures. Il passa la corde sur la pince et tira dessus de toutes ses forces et par saccades… Elle se rompit en trois endroits.

Cette découverte consterna le vieux soldat.

— Vous voici dans de beaux draps, caporal, grommela-t-il.

Une partie de la corde était tombée avec le malheureux baron, et il était clair que tous les morceaux réunis ne suffiraient pas pour atteindre le bas du rocher.

De cette saillie isolée, il était impossible de gagner le terre-plein de la citadelle.

Avec ce rapide coup d’œil des gens d’exécution, l’honnête Bavois envisagea la situation sous toutes ses faces, et il la vit désespérée.

— Allons, murmura-t-il, vous êtes f…lambé, caporal, il n’y a pas à dire mon bel ami ! Au jour, on arrive et on trouve vide la prison du baron… On met le nez à la fenêtre, et on vous aperçoit ici, comme un saint de pierre sur son piédestal… Naturellement, on vous repêche, on vous juge, on vous condamne, et on vous mène faire un tour dans les fossés de la citadelle… Portez armes !… Apprêtez armes !… Joue !… Feu !… Et voilà l’histoire.

Il s’arrêta court… Une idée lui venait vague encore, indécise, qu’il sentait devoir être une idée de salut.

Elle lui venait en regardant et en touchant la corde qui lui avait servi à descendre de la prison sur la saillie, et qui, solidement attachée aux barreaux, pendait le long du mur.

— Si vous aviez cette corde, qui pend là, inutile, caporal, reprit-il, vous l’ajouteriez aux morceaux de celle-ci, et vous vous laisseriez glisser jusqu’au bas du ro-