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Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/386

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quand je vous aurai exposé les raisons qui les ont dictées.

« Venez donc à Montaignac, le plus tôt sera le mieux, je vous attends. »

S’il n’eût écouté que les suggestions de son impatience, le duc de Sairmeuse eût fait atteler à l’instant même, et se fût mis en route.

Mais pouvait-il, décemment, abandonner ainsi brusquement le marquis de Courtomieu, qui avait accepté son hospitalité, et Mme Blanche, la femme de son fils, en définitive.

S’il eût pu les voir encore, leur parler, les prévenir…

Il l’essaya en vain… Mme Blanche s’était enfermée et refusait d’ouvrir ; le marquis s’était mis au lit, avait envoyé chercher un médecin qui l’avait saigné, et il se déclarait à la mort.

Le duc de Sairmeuse se résigna donc à une nuit encore d’incertitudes, vraiment intolérables, pour un caractère comme le sien.

— Attendons, se disait-il, demain à l’issue du déjeuner, je saurai bien trouver un prétexte pour m’esquiver quelques heures sans dire que je vais rejoindre Martial…

Il n’eut pas cette peine…

Le lendemain, sur les neuf heures du matin, comme il finissait de s’habiller, on vint lui annoncer que M. de Courtomieu et sa fille l’attendaient au salon.

Surpris, il se hâta de descendre.

Quand il entra, le marquis de Courtomieu, qui était assis dans un fauteuil, se dressa tout d’une pièce, s’appuyant sur l’épaule de tante Médie…

Et Mme Blanche s’avança d’un pas raide, pâle et défaite, autant que si on lui eût tiré des veines la dernière goutte de sang.

— Nous partons, monsieur le duc, dit-elle froidement, et nous venons vous faire nos adieux.

— Comment, vous partez, vous ne voulez pas…

D’un geste doux la jeune femme l’interrompit, et ti-