Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/405

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sa corbeille, elle sut se contraindre à paraître gaie et insouciante.

Mais le dimanche suivant, ayant osé aller à la grand’messe au village de Sairmeuse, elle comprit l’inanité de ses efforts.

On ne la regardait pas d’un air surpris ni haineux, mais on tournait la tête sur son passage pour rire aux éclats. Elle put même entendre sur son état de demoiselle-veuve, des quolibets qui lui entrèrent dans l’esprit comme des pointes de fer rouge.

On se moquait… Elle était ridicule !… Ce fut le comble.

— Oh !… Il faudra qu’on me paye tout cela, répétait-elle.

Mais Mme Blanche n’avait pas attendu cette suprême injure pour songer à se venger, et elle avait trouvé son père prêt à la seconder.

Pour la première fois, le père et la fille avaient été d’accord.

— Le duc de Sairmeuse saura ce qu’il en coûte, disait M. de Courtomieu, de prêter les mains à l’évasion d’un condamné et d’insulter ensuite un homme comme moi !… Fortune politique, position, faveur, tout y passera !… Je veux le voir ruiné, déconsidéré, à mes pieds !… Tu verras… tu verras !…

Malheureusement pour lui, le marquis de Courtomieu avait été malade trois jours, après les scènes de Sairmeuse, et il avait perdu trois autres jours à composer et à écrire un rapport qui devait écraser son ancien allié.

Ce retard devait le perdre, car il permit à Martial de prendre les devants, de bien mûrir son plan, et de faire partir pour Paris le duc de Sairmeuse, habilement endoctriné…

Que raconta le duc à Paris ?… Que dit-il au roi qui daigna le recevoir ?…

Il démentit sans doute ses premiers rapports, il réduisit le soulèvement de Montaignac à ses proportions