Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/424

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— Comme partout : trois grandes chambres carrelées qui se commandent, une cuisine, une autre petite pièce noire…

— Voilà pour le rez-de-chaussée. Passons à l’étage supérieur.

— C’est que… dame !… je n’y suis jamais monté.

— Tant pis. Comment sont meublées les pièces que vous avez visitées ?…

— Comme celles de tous les paysans d’ici.

Personne, assurément, ne soupçonnait l’existence de cette chambre magnifique du premier étage, que Chanlouineau, dans sa folie, destinait à Marie-Anne. Jamais il n’en avait parlé, même il avait pris les plus grandes précautions pour qu’on ne vît pas apporter les meubles.

— Combien de portes à la maison ? poursuivit madame Blanche.

— Trois : une sur le jardin, une sur le verger ; la troisième communique avec l’écurie. L’escalier qui mène au premier étage se trouve dans la pièce du milieu.

— Et Marie-Anne est seule à la Borderie ?…

— Toute seule pour le moment. Mais je suppose que son brigand de frère ne tardera pas à aller demeurer avec elle…

Au lieu de répondre, Mme Blanche s’absorba dans une sorte de rêverie si profonde et si prolongée, que le vieux maraudeur, à la fin, s’en impatienta.

Il osa lui toucher le bras, et de cette voix étouffée de complices méditant un mauvais coup :

— Eh bien ! fit-il, que décidons-nous ?…

La jeune femme tressaillit et frissonna, comme le malade qui tout à coup, dans l’engourdissement de la douleur, entend le cliquetis des terribles instruments du chirurgien…

— Mon parti n’est pas encore pris, répondit-elle, je réfléchirai, je verrai…

Et remarquant la mine décontenancée du vieux maraudeur :