Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/466

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et il expira, sans avoir pu dire aux siens où il avait enfoui le prix du sang de Lacheneur.

XLVII


De tous les gens qui avaient été témoins de l’épouvantable chute du baron d’Escorval, l’abbé Midon avait été le seul à ne pas désespérer…

Il n’était pas médecin, de par le diplôme ; mais il avait en sa vie, toute de dévouement, raccommodé tant de bras et « rebouté » tant de jambes, que les blessures, ainsi qu’il le disait, le connaissaient.

Ce que plus d’un savant docteur n’eût pas osé, il l’osa.

Il était prêtre, il avait la foi, il se souvint de la réponse sublime de modestie d’Ambroise Paré : « Je le pansai, Dieu le guérit. »

Le baron devait être guéri.

Après six mois passés à la ferme du père Poignot, M. d’Escorval se levait et s’essayait à marcher en s’aidant de béquilles.

C’est alors, surtout, qu’il souffrit du défaut d’espace, dans le grenier où la prudence le confinait, et c’est avec un véritable transport de joie qu’il accueillit l’idée de se réfugier à la Borderie, près de Marie-Anne.

Le jour du départ fixé, c’est avec l’impatience d’un écolier attendant les vacances qu’il compta pour ainsi dire les minutes. Il y a toujours de l’enfant, chez le convalescent qui se reprend à aimer la vie.

— J’étouffe, ici, répétait-il à sa femme, j’étouffe !… Comme le temps est long !… Quand donc arrivera le jour béni !…

Il arriva. Dès le matin, tous les objets que les pros-