Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/490

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L’instinct l’avertissait du danger qu’elle courait à changer quelque chose à ses habitudes.

Elle renvoya donc tante Médie, en lui recommandant bien de défaire son lit, et comme tous les jours elle sonna…

Il était près de onze heures, et elle venait d’achever sa toilette, quand la cloche du château tinta, annonçant une visite.

Presque aussitôt, une femme de chambre parut, tout effarée.

— Qu’y a-t-il ? demanda vivement Mme Blanche ; qui est là ?

— Ah ! madame !… c’est-à-dire, mademoiselle, si vous saviez…

— Parlerez-vous !…

— Eh bien ! M. le marquis de Sairmeuse est en bas, dans le petit salon bleu, et il prie mademoiselle de lui accorder quelques minutes…

La foudre tombant aux pieds de l’empoisonneuse l’eût moins terriblement impressionnée que ce nom qui éclatait là, tout à coup.

Sa première pensée fut que tout était découvert… Cela seul pouvait amener Martial.

Elle avait presque envie de faire répondre qu’elle était absente, partie pour longtemps, ou dangereusement malade, mais une lueur de raison lui montra qu’elle s’alarmait peut-être à tort, que son mari finirait toujours par arriver jusqu’à elle, et que, d’ailleurs, tout était préférable à l’incertitude.

— Dites à M. le marquis que je suis à lui dans un instant, répondit-elle.

C’est qu’elle voulait rester seule un peu, pour se remettre, pour composer son visage, pour rentrer en possession d’elle-même, s’il était possible, pour laisser au tremblement nerveux qui la secouait comme la feuille, le temps de se calmer.

Mais au moment où elle s’inquiétait le plus de l’état