Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/537

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que chose de sa vie pour sentir tante Médie à six pieds sous terre.

En ce moment, la mort de cette pauvre vieille l’affectait profondément.

Elle perdait une complice qui parfois l’avait consolée, et elle ne gagnait rien en liberté, puisqu’une femme de chambre se trouvait initiée au secret du crime de la Borderie.

Toutes les personnes de l’intimité de la duchesse de Sairmeuse remarquèrent, à cette époque, son abattement et s’en étonnèrent.

— N’est-il pas singulier, disait-on, que la duchesse, une femme supérieure, regrette si fort cette antique caricature !

C’est que Mme Blanche avait été extraordinairement impressionnée par les sinistres prophéties de cette parente pauvre, devenue à la longue son âme damnée, et à qui elle avait refusé les consolations suprêmes de la religion.

Contrainte à un retour vers le passé, elle s’épouvantait, comme jadis les paysans de Sairmeuse, de l’acharnement de la fatalité à poursuivre, jusque dans leurs enfants, ceux qui avaient versé le sang.

Quelle fin ils avaient eu, tous, depuis les fils de Chupin, le traître, jusqu’à son père, le marquis de Courtomieu, le grand prévôt, qui avant de mourir avait traîné dix ans sous les huées un corps dont la pensée s’était envolée.

— Mon tour viendra ! pensait-elle.

L’année précédente, s’étaient éteints, à un mois d’intervalle, pleurés de tous, le baron et la baronne d’Escorval, et aussi le vieux caporal Bavois.

De telle sorte que de tant de gens de conditions diverses, mêlés aux troubles de Montaignac, Mme Blanche n’en apercevait plus que quatre :

Maurice d’Escorval, entré dans la magistrature, et qui était juge près du tribunal de la Seine, l’abbé Midon