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Caché à l’étage supérieur de la Poivrière, Jean la vit par une fente du plancher, remettre un billet de banque à la Chupin.

— Maintenant, pensait-il, je la tiens !… Dans quels bourbiers dois-je la traîner, avant de la livrer à la vengeance de son mari !…

LIV


Dix lignes de l’article consacré à Martial de Sairmeuse, par la biographie générale des hommes du siècle, expliquent son existence après son mariage.

« Martial de Sairmeuse, y est-il dit, dépensa au service de son parti la plus haute intelligence et d’admirables facultés… Mis en avant au moment où les passions politiques étaient le plus violentes, il eut le courage d’assumer seul la responsabilité des plus terribles mesures…

Obligé de se retirer devant l’animadversion générale, il laissa derrière lui des haines qui ne s’éteignirent qu’avec la vie. »

Mais ce que l’article ne dit pas, c’est que si Martial fut coupable — et cela dépend du point de vue — il le fut doublement, car il n’avait pas l’excuse de ces convictions exaltées jusqu’au fanatisme qui font les fous, les héros et les martyrs.

Et il n’était pas même ambitieux.

Tous ceux qui l’approchaient, lorsqu’il était aux affaires, témoins de ses luttes passionnées et de sa dévorante activité, le croyaient ivre du pouvoir…

Il s’en souciait aussi peu que possible. Il jugeait les charges lourdes et les compensations médiocres. Son or-