Page:Gaboriau - Monsieur Lecoq, Dentu, 1869, tome 2.djvu/556

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des deux bandits, et ils se précipitèrent sur Martial, résolus à le tuer…

D’un bond de côté, Martial les évita. Il avait à la main son revolver, il fit feu deux fois, les deux misérables tombèrent.

Il n’était pas sauvé pour cela, car le jeune soldat se jeta sur lui, s’efforçant de le désarmer.

Tout en se débattant furieusement, Martial ne cessait de crier d’une voix haletante :

— Fuyez !… Blanche, fuyez !… Otto n’est pas loin !… Le nom… Sauvez l’honneur du nom !…

Les deux femmes s’enfuirent par une seconde issue, donnant sur un jardinet, et presque aussitôt des coups violents ébranlèrent la porte.

On venait !… Cela doubla l’énergie de Martial, et dans un suprême effort il repoussa si violemment son adversaire, que la tête du malheureux portant sur l’angle d’une table, il resta comme mort sur le coup.

Mais la veuve Chupin, descendue au bruit, hurlait. À la porte, on criait :

— Ouvrez, au nom de la loi !…

Martial pouvait fuir. Mais fuir, c’était peut-être livrer la duchesse, car on le poursuivrait certainement. Il vit le péril d’un coup d’œil, et son parti fut pris.

Il secoua vivement la Chupin, et d’une voix brève :

— Cent mille francs pour toi, dit-il, si tu sais te taire.

Puis, attirant une table à lui, il s’en fit comme un rempart.

La porte volait en éclats… Une ronde de police, commandée par l’inspecteur Gévrol, se rua dans le bouge.

— Rends-toi ! cria l’inspecteur à Martial.

Il ne bougea pas, il dirigeait vers les agents les canons de son revolver.

— Si je puis les tenir en respect et parlementer seulement deux minutes, pensait-il, tout peut encore être sauvé…