Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/191

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Costal n’acheva pas ; il regardait autour de lui d’un air plus soucieux. Un autre homme venait de s’engloutir ; car les progrès de l’eau, à l’avant de l’embarcation, avaient encore augmenté son inclinaison, et déjà sur l’arrière, où se tenaient Lantejas, l’Indien et un troisième, il fallait redoubler d’efforts pour ne pas glisser sur la pente rapide. Néanmoins, à mesure que ceux de l’avant disparaissaient, le canot, allégé de leur poids, semblait reprendre une position plus horizontale.

« Vous savez nager, capitaine ? dit Costal.

— Oui, assez pour me soutenir quelques instants sur l’eau.

— Bon ! » dit laconiquement l’Indien ; et, avant que don Cornelio eût le temps de pénétrer son intention, Costal, profitant du moment où la houle faisait pencher le canot sur l’un de ses plats-bords, lui donna dans le même sens une si violente impulsion, qu’il le fit complètement chavirer.

Le capitaine fut englouti avec une telle rapidité, qu’il ne put pousser un seul cri, et une seconde après, il se sentit si fortement saisir par ses vêtements, qu’il se crût dévoré. Il revint à la surface complètement étourdi ; Costal le tenait d’une main et de l’autre s’accrochait au canot, qui flottait la quille en l’air.

« Ne craignez rien, dit l’Indien ; je suis avec vous. »

Et ses efforts, joints à ceux que faisait machinalement l’infortuné capitaine, parvinrent à placer ce dernier à cheval sur la quille du canot. L’Indien s’y plaça près de lui.

De onze qu’ils étaient un moment auparavant, eux seuls restaient.

Les regards éperdus de Cornelio erraient sur le vaste Océan, qui déjà commençait à rugir sous son manteau d’écume que fouettait le vent !

« J’ai sacrifié pour vous tous ces pauvres diables, dit Costal ; un quart d’heure de plus, le canot s’enfonçait