Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/194

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le courage invincible du Zapotèque lui fournirait.

Il se crut presque sauvé quand, il entendit l’Indien lui dire :

« Seigneur don Cornelio, que ne donneriez-vous pas pour vous trouver encore couché dans un hamac avec des enlacements de serpents à sonnettes et des groupes de tigres pour ciel de lit ? »

Costal plaisantant, c’était bon signe ; cependant il reprit bientôt d’un ton inquiet :

« Nos compagnons seraient-ils par hasard retournés sur leurs pas ? »

Dans une position affreuse comme celle-là, les moindres soupçons fâcheux deviennent une certitude, et le capitaine ne douta pas un instant que les baleinières n’eussent regagné le rivage qu’elles avaient quitté deux heures auparavant. Une pareille crainte était cependant absurde ; il était plus naturel de supposer qu’en attendant les nouvelles que le canot devait rapporter, les embarcations étaient restées au même endroit, à présent surtout que la défiance de ceux qui les montaient se trouvait sans doute éveillée par une détonation qu’ils n’avaient pu manquer d’entendre. Cette dernière probabilité ne tarda pas à frapper Costal, qui parut réfléchir plus profondément.

Cependant les lames étaient assez grosses déjà pour faire éprouver de violentes secousses au canot, et, d’après les sifflements du vent, il était facile de voir qu’elles allaient grossir encore.

« Écoutez, seigneur don Cornelio Lantejas (nous aurions dû dire plus tôt que, depuis qu’il était proscrit sous le nom de Lantejas, ce nom paraissait toujours fâcheux à don Cornelio ; cette fois, il lui parut de mauvais augure plus que jamais) ; écoutez : je sais que la mort ne vous effraye pas ; eh bien ! je ne dois pas vous cacher que d’ici à une heure les lames nous auront coulés bas, si vous attendons qu’elles grossissent encore.