Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/276

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gnait autour de lui, le bruit, vague d’abord, puis ensuite plus distinct, d’une colonne d’armée en marche.

Cette réalité le ramenait du pays des chimères à la vie d’aventures des guerres civiles, et, faisant trêve tout à coup aux pensées qui l’avaient absorbé, il écouta plus attentivement.

Depuis près de deux ans que le colonel était entré en campagne, il savait se rendre compte de tous les bruits qui signalent ou accompagnent la marche d’une troupe armée. Les pas cadencés, le roulement lointain de l’artillerie et des caissons, devinrent aussi distincts pour lui que s’il avait aperçu la troupe elle-même.

C’était sans nul doute une division qui s’avançait au secours des assiégés : les coups de fusil d’alerte de la nuit précédente, la sentinelle égorgée, les hourras des assiégés au matin, ne laissaient aucune incertitude à cet égard ; ils avaient appris l’arrivée prochaine du corps d’armée dont on entendait la marche.

Sûr de son fait et ne voulant pas perdre une minute à écouter plus longtemps, don Rafael mit son cheval au galop et regagna le camp de Caldelas, où il donna l’alarme.

Le premier moment de confusion passé, les royalistes attendirent l’attaque en s’y préparant avec le sang-froid de la discipline. Tout le monde était à son poste.

Le soleil lançait ses premiers rayons. Bientôt, de part et d’autre, les sentinelles avancées se replièrent sur leurs camps respectifs. Alors, vers la ville, on entendait retentir le psaume Venite exsultemus Domino ; des cris de : Viva Morelos ! éclatèrent dans la direction opposée ; puis la voix du mariscal, dans un moment où le chant religieux mourait lentement et où les vivats se taisaient, jeta le cri de guerre bien connu : Aqui esta Galeana ! et une double fusillade entama un formidable dialogue des deux côtés du camp royaliste.

Trujano et Morelos se répondaient, l’un sur le front,