Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/359

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ter, quand il lui sembla voir aller et venir des lumières à travers le sommet de grands arbres dont, au détour de la route, il venait tout à coup de découvrir les silhouettes noires.

Le terrain s’élevait à quelques pas devant don Cornelio, et, parvenu à cette élévation, il distingua dans le fond d’un vallon un vaste bâtiment dont les croisées étaient si vivement éclairées, que l’intérieur en paraissait livré aux flammes.

Sur l’azotea, ou toit plat, du bâtiment, des torches et des flambeaux s’agitaient en tous sens, et c’était la clarté qu’ils répandaient qui avait frappé le capitaine de loin, et qui, de la hauteur où elle brillait, atteignait la cime des arbres plantés au bas de la route, près de l’hacienda.

Il y avait quelque chose de si extraordinaire dans ces lumières qu’on voyait s’agiter, pour ainsi dire, dans l’air ; à l’intérieur, les flammes ardentes et de diverses couleurs qu’on apercevait à travers les vitres, et qui, passant du rouge le plus foncé au bleu pâle ou au violet livide, changeaient de nuance à chaque instant, tout cet ensemble offrait un si étrange aspect, que don Cornelio n’osa plus avancer d’un pas.

Les superstitions dont l’Indien l’avait entretenu pendant tout le voyage lui revinrent tout à coup à l’esprit, et il n’y eut pas jusqu’aux anathèmes fulminés par l’évêque de Oajaca contre les insurgés, que son fameux mandement convertissait en esprits de ténèbres, qui ne reprissent créance dans son imagination troublée. L’effroi du capitaine changeait tout à coup de nature.

Les volutes de flammes si bizarrement coloriées qu’il voyait si alternativement s’abaisser ou grandir derrière le vitrage, sans qu’elles s’ouvrissent une issue au dehors comme l’aurait fait un incendie ordinaire, lui firent craindre un instant d’être tombé dans un lieu maudit.

Le silence qui régnait au milieu de cette scène loin-