Page:Gabriel Ferry - Costal l'Indien, 1875.djvu/445

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« Je ne sais, dit-il en hésitant ; je n’ai vu personne… que des brigands, dont deux sont restés sur le carreau.

— Cherchez-la, pour l’amour de Dieu, reprit l’Espagnol ; elle ne doit pas être loin… Je parle de ma femme… nous avons trouvé près d’ici ce mouchoir de soie… plus près encore, ce soulier. Ah ! si je pouvais seulement embrasser Marianita avant de mourir ! »

En parlant ainsi, le jeune homme, plein d’angoisses et d’un air déchirant, montrait les deux objets appartenant à celle que les roseaux du lac allaient probablement lui rendre sans vie.

Le capitaine laissa retomber les rideaux de la litière et rejoignit Costal, qui continuait à exhaler toute la fureur qu’avait excitée chez lui le cruel désappointement qu’il venait d’éprouver.

Don Cornelio voulut lui faire part de ses craintes au sujet de la jeune femme…

« Vous êtes fou ! lui dit l’Indien d’un ton de mauvaise humeur ; la femme que vous avez vue dans les roseaux, c’est Matlacuezc… et j’allais l’enlacer dans mes bras quand cet infâme bandit est venu la faire disparaître ! ajouta-t-il avec rage.

— Le fou, c’est vous, malheureux païen ! la pauvre créature qu’a sans doute frappée la balle qui vous était destinée n’est autre que la femme de cet infortuné jeune homme. »

Pendant que, les yeux toujours fixés sur la litière, le capitaine cherchait à dissiper les illusions dont se repaissait Costal, les porteurs de torches et ceux du brancard, revenus de leur frayeur, avaient repris leurs recherches sur les bords du lac.

Tout à coup un d’entre eux jeta un cri horrible.

« La voilà ! » s’écria-t-il ; puis ce cri fut suivi d’un hurlement funèbre à la mode indienne. Ce hurlement apprit à l’Espagnol le malheur qu’on aurait voulu lui cacher.