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un casse-tête, un long couteau sans gaîne et le fourreau d’une pipe indienne.

Ainsi accoutré, personne n’eût pu reconnaître dans le renégat américain les traits distinctifs de la race blanche.

Sang-Mêlé avait quelque ressemblance avec son père, et les yeux de l’un et de l’autre indiquaient une égale férocité ; toutefois le caractère indien de la physionomie du métis ne dénotait pas la bassesse d’âme si visible chez le père. Aussi grand, mais plus vigoureusement taillé que lui. El-Mestizo avait hérité de la force prodigieuse du vieux renégat, que l’âge n’avait point encore diminuée. En un mot, il y avait chez le fils du tigre et du lion à la fois. Chez le père c’était comme le tigre du Bengale greffé sur le chacal d’Amérique.

Les cheveux épais et noirs d’El-Mestizo étaient relevés ainsi que ceux de Main-Rouge, non pas par des courroies de peau, mais par des rubans écarlates, comme ceux qu’on tresse parfois à la crinière des chevaux.

Son vêtement de chasse, de la même forme que celui de l’Américain, était de drap rouge, et le reste de son costume ne différait de celui de son père que par le luxe des ornements dont un jeune fat indien se plaît à relever les agréments de sa personne.

Sa main soutenait sur son épaule une longue carabine dont la crosse et le bois, parsemés de clous à tête de cuivre brillants comme de l’or, étaient curieusement ornés de dessins au vermillon. Tels étaient les deux redoutables forbans du désert.

Ces deux bandits à la physionomie repoussante, à laquelle ils cherchaient à donner l’air de gravité des Indiens, formaient un contraste frappant avec Bois-Rosé, dont la figure calme et les formes athlétiques présentaient la plus belle expression de la force loyale qui se repose sur la valeur.

« Que veut-on à l’Aigle des Montagnes-Neigeuses, puis-