Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/143

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– Concis, clair et insolent, pensa Pepe. Voyons comment Bois-Rosé va digérer cela. »

Un homme moins confiant dans la supériorité que lui donnaient le nombre de ses alliés, son adresse et sa force physique, eût frémi devant l’expression momentanée du visage de l’athlétique coureur des bois. C’est que, malgré sa fervente tendresse pour Fabian, Bois-Rosé ne sentait plus qu’un ardent désir de châtier l’insolence du bandit.

« Hum ! fit le Canadien avec un effort qui dut lui coûter beaucoup, à l’aspect du métis arrogamment campé sur le canon de son rifle, et sous quelles conditions vous faut-il ce trésor ?

– À la condition par vous trois de déguerpir au plus vite.

– Avec armes et bagages ?

– Avec bagages, mais sans armes, reprit El-Mestizo, bien sûr qu’alors il lui serait facile, en dépit de la foi jurée, de livrer les trois chasseurs à ses sauvages auxiliaires.

– Si les deux scélérats n’en voulaient pas à notre vie, nombreux comme ils doivent l’être, il leur importerait peu que nous conservassions nos armes, souffla Pepe à l’oreille du Canadien.

– C’est clair comme le jour ; mais laissez-moi démasquer ces coquins, » reprit tout bas Bois-Rosé. Puis tout haut au métis : « Les trésors que nous abandonnerions ne sont-ils pas suffisants ? À quoi vous serviraient trois carabines entre quinze guerriers ?

– À vous mettre hors d’état de nous nuire. »

Le Canadien haussa les épaules.

« Ce n’est pas répondre, dit-il ; vous avez affaire à des hommes qui peuvent tout entendre, sans s’émouvoir des menaces et sans se laisser leurrer par des phrases menteuses… Il faut savoir une bonne fois à quoi s’en tenir, » poursuivit-il en s’adressant à Pepe.