Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/17

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Le fait est que, par suite d’une conformité d’idées, source de leur étroite amitié, les deux drôles devinrent tout à coup rêveurs.

L’explosion d’une carabine, répercutée par l’écho des montagnes, interrompit leur rêverie.

« C’est le second coup de fusil qui trouble le calme profond de ces solitudes. Le premier a dû briser le crâne de Diaz, et il me serait bien douloureux de penser que le second a terminé les campagnes de don Estévan de la même façon, s’écria Oroche, qui dissimulait assez mal son vif désir de demeurer seul possesseur du secret du val d’Or.

– Je le conçois, répondit avec distraction Baraja ; ces solitudes sont effrayantes pour deux hommes isolés comme nous allons l’être à présent.

– Caramba ! pensa Oroche, mon ami Baraja, quoi qu’il en dise, me trouverait-il encore de trop avec lui ?

– Pourquoi donc armez-vous votre carabine, seigneur Oroche ? demanda vivement Baraja à son ami.

– Sait-on ce qui peut arriver dans ces déserts ? Voyez-vous, il faut être prêt à tout.

– Vous avez raison, on ignore ce qui peut advenir. »

En disant ces mots, Baraja fit également jouer la batterie de son arme et se tint sur la défensive.

« Ah çà ! qu’allons-nous faire maintenant ? dit Oroche.

– Sommes-nous assez forts pour déloger de leur forteresse ces trois endiablés chasseurs ? Non. Eh bien, il nous faut retourner au camp, répondit Baraja, et revenir en force faire main basse sur les usurpateurs des trésors étalés dans le vallon que nous n’avons fait qu’entrevoir.

– Partons donc au plus vite, s’écria Oroche avec impétuosité.

– Nous n’avons pas une minute à perdre, » ajouta Baraja.