Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/171

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chasseurs reprirent le plus commodément possible leur position horizontale, l’œil toujours appliqué aux embrasures de leurs remparts.

Mais, la soif satisfaite, la faim se fit de nouveau sentir ; car il était près de quatre heures, et il y en avait douze environ que les assiégés avaient pris leur frugal et insuffisant repas de farine de maïs. Outre que la nécessité faisait aux assiégés une loi impérieuse de ménager leurs vivres, il fallait attendre la nuit pour pouvoir se livrer, en sûreté et à l’abri des balles, aux préparatifs, tout simples qu’ils étaient, de ce que Pepe voulait bien appeler un souper.

Leur retranchement ne les mettait parfaitement en sûreté que tant qu’ils étaient couchés derrière, et le moindre écart de la ligne horizontale les exposait aux coups de l’ennemi.

Il y eut un moment, après une longue et nouvelle attente, où les yeux des chasseurs virent un mouvement s’opérer au sommet des rochers qui leur faisaient face, mais à un niveau, comme on sait, inférieur de quelques pieds à celui de leur plate-forme. Les buissons qui en couronnaient le faîte s’agitèrent rapidement, et bientôt un manteau de peau de bison se déploya au-dessus des branchages sur lesquels il resta étendu.

« Ah ! voilà le commencement d’exécution d’un plan quelconque, dit Bois-Rosé ; c’est pour détourner peut-être notre attention du véritable côté où sera le danger.

– Il viendra de là, soyez-en sûr, reprit Pepe ; que cinq ou six peaux de buffles soient ajoutées à celle-là, et deux hommes peuvent se mettre à genoux derrière un rempart impénétrable aux balles de nos carabines, quelque courte que soit la distance qui nous sépare. »

Comme Pepe achevait sa remarque, un second manteau, jeté par-dessus le premier par une main invisible, vint confirmer son assertion.

« Quoi qu’il en puisse être, ajouta le Canadien, je