Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/224

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les environs : la troupe sauvage ne saurait en effet fréquenter longtemps des parages où l’eau manquerait, car elle lui est nécessaire non-seulement pour apaiser la soif, mais encore pour la guérison d’une infinité de maladies pour lesquelles elle est un souverain remède.

Trouver l’abreuvoir est encore une difficulté, et, au milieu de plaines arides ou de forêts impénétrables, l’Européen mourrait peut-être de soif avant de le découvrir. Les chevaux, guidés par le merveilleux instinct dont ils sont doués, choisissent d’habitude quelque lac ou quelque mare presque inaccessible ; mais une observation constante de la nature donne aux habitants des frontières un instinct aussi merveilleux que celui des animaux qu’ils chassent. C’est cet instinct que nous appelons la science du désert.

Lorsque l’un des détachements de chasseurs a trouvé l’endroit où les chevaux se désaltèrent, comme il est évident qu’ils doivent y venir chaque jour au coucher du soleil, tous les autres détachements, à l’aide de signaux convenus, de points de repère arrêtés d’avance, se réunissent à cet endroit, et les préparatifs de la chasse commencent.

Comme nous l’avons dit dans le chapitre qui précède, les chasseurs coupent en premier lieu de gros troncs d’arbres dont ils forment un corral (une enceinte) solide, avec une ouverture en face de l’abreuvoir (estero).

Cette opération dure, selon le nombre et l’activité des chasseurs, dix ou douze jours pendant lesquels ils campent dans la forêt. Heureux alors le voyageur curieux des récits du désert, que sa bonne étoile conduira dans un de ces campements !

Admis avec cordialité à partager la ration de pinole et de cecina qui composent la nourriture frugale des chasseurs, il trouvera toujours trop courtes les veillées autour du foyer où pétille et flambe le chêne ; car on ne saurait se lasser d’entendre de la bouche des hôtes du