Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/238

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Aux ornements effrayants et bizarres à la fois de sa coiffure, à la peinture de ses traits et de son corps et aux tatouages de sa peau rouge, on ne pouvait méconnaître un Indien. Encinas lui-même partagea un instant la surprise mêlée d’effroi des témoins de cette étrange apparition. Mais bientôt il rassura d’un geste don Augustin, qui s’élançait vers les armes suspendues à l’entrée de sa tente, et le sénateur, que la frayeur clouait à sa place, aussi bien que la jeune fille elle-même.

« Ce n’est rien, dit le chasseur de bisons, c’est un ami, effrayant à voir, il est vrai ; c’est celui à qui j’ai l’immense obligation que je disais tout à l’heure à madame. »

Pour achever de dissiper un reste de défiance chez ses auditeurs, Encinas s’avança tranquillement du côté de l’Indien. Celui-ci, du reste, à la vue des personnages assis sur les bords du lac, avait remis en bandoulière la carabine qu’il tenait à la main. Il côtoyait les bords de l’eau pour arriver jusqu’au chasseur de bisons.

C’était un jeune guerrier aux formes élégantes et nerveuses, au pas élastique et fier. Ses robustes épaules et sa large poitrine étaient nues, et autour de ses reins, étroits et cambrés, se drapait un fin zarape du Saltillo, aux couleurs brillantes et variées.

Des guêtres de drap écarlate couvraient ses jambes ; des jarretières brodées en crin, auxquelles étaient attachés des glands curieusement ouvragés de soies de porc-épic, fixaient ses guêtres ; enfin ses pieds étaient chaussés de brodequins d’un travail non moins curieux que les jarretières.

Sa tête entièrement rasée, à l’exception d’une touffe de cheveux courts qui formaient comme le cimier d’un casque, était ornée d’une coiffure bizarre. C’était une espèce de turban étroit, composé de deux mouchoirs pittoresquement enroulés l’un sur l’autre. La peau desséchée et luisante d’un énorme serpent à sonnettes se mê-