Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/243

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chasseurs de bisons, l’attitude enfin des personnages de chaque groupe, donnaient aux bords du lac un aspect non moins pittoresque pendant la nuit que celui qu’ils offraient à la lumière du jour.

« Je vous ai gardé de quoi souper, dit le novice à Encinas ; car enfin il est juste que chacun ait sa part, surtout vous, qui racontez de si merveilleuses histoires. »

Encinas se mit vigoureusement en besogne, après avoir remercié le novice de sa prévenante attention ; mais il mangeait avec autant de taciturnité que d’appétit, et son jeune pourvoyeur ne trouvait pas son compte à ce silence.

« Vous n’avez donc rien vu de nouveau dans les environs ? » dit-il pour entrer en matière.

Le chasseur fit signe que non ; mais il n’ouvrait la bouche que pour manger.

« Tout ça n’empêche pas, reprit le novice, que Francisco ne soit pas encore de retour de sa chasse au Coursier-blanc-des-Prairies.

– Le Coursier-blanc-des-Prairies ! dit un des vaqueros ; quel animal est-ce que celui-là ?

– Un animal merveilleux, répondit le jeune homme ; mais, dame, je n’en sais pas plus long. Le seigneur Encinas vous le dira.

– Vous l’avez vu, parbleu ! répliqua le chasseur de bisons ; votre camarade a voulu le poursuivre, et il a manqué de se rompre le cou. C’est ce qui arrive toujours, je vous l’ai dit.

– Si mon cheval n’avait pas eu trop d’ardeur, il n’aurait pas glissé, et en ne glissant pas…

– Vous ne seriez pas tombé. Mais votre bête a glissé, et voilà.

– Bah ! cela m’est arrivé avec bien d’autres. L’important pour l’honneur d’un vaquero est de ne tomber qu’avec son cheval.

– C’est vrai ; mais, si vous aviez pratiqué comme moi