Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/244

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les prairies de l’Ouest, reprit Encinas fort sérieusement, vous sauriez qu’on y rencontre de temps à autre un cheval blanc si beau qu’on n’en voit pas le pareil, si rapide qu’au trot il va plus vite qu’un autre à toute course ; et je vous défie de me dire que vous avez vu jamais un cheval plus magnifique, plus léger que ce cheval blanc de ce soir.

– J’en conviens, répondit le vaquero.

– Eh bien ! ce cheval est, sans nul doute, celui qu’on appelle le Coursier-blanc-des-Prairies.

– Ça, moi je le crois, s’écria le novice avec une conviction profonde.

– Eh bien ! qu’a-t-il de particulier, ce cheval ? demanda le vaquero.

– D’abord son incomparable beauté, puis ensuite sa légèreté sans égale, et enfin… Voyons, quel âge lui donneriez-vous bien ?

– Ce cheval-là est encore loin de cesser de marquer, s’écria tout le monde d’une voix unanime.

– C’est ce qui vous trompe, répondit gravement Encinas ; ce cheval blanc a quelque chose comme cinq cents ans ! »

Un cri général s’éleva contre l’assertion du chasseur de bisons.

« C’est comme j’ai l’honneur de vous le dire, reprit-il avec une assurance qui convainquit presque ses auditeurs.

– Mais, fit observer le vaquero, j’ai ouï dire, ce me semble, qu’il n’y a pas encore trois cents ans que les Espagnols ont apporté des chevaux en Amérique.

– Bah ! s’écria le novice, deux cents ans de plus ou de moins, qu’est-ce que ça fait ? Trois cents ans, c’est déjà joli.

– Et puis, reprit Encinas, que l’objection du vaquero n’avait pas déconcerté, pensez-vous que ce cheval-là soit jamais sorti des flancs d’une jument ? lui-même ne fré-