Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/261

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Des cris de joie s’élevèrent de tous côtés à l’instant où Encinas et ses trois compagnons, presque engloutis sous cette avalanche vivante, se coulèrent hors du corral à travers les barres de bois de la barrière, qu’ils avaient fermée, non sans danger d’être écrasés sous les pieds des chevaux.

Quelques secondes s’écoulèrent sans que ces orgueilleux enfants des forêts s’aperçussent qu’ils étaient captifs ; mais quand, pour la première fois de leur vie, ils se sentirent entourés par une enceinte de troncs d’arbres que la tête du plus haut d’entre eux dépassait à peine, des hennissements de douleur furieuse éclatèrent avec le fracas de cent clairons. C’était un spectacle beau à voir que cette masse d’animaux effarés, bondissant avec rage, lançant des flots d’écume par la bouche, et dont les yeux hagards se portaient en vain de tous côtés pour chercher une issue.

Un cri de triomphe des vaqueros retentit dans la forêt, et fut répété par l’écho.

« Ah ! il y est ! il y est ! s’écria la voix tonnante d’Encinas.

– Qui ? s’écrièrent vingt autres voix.

– Le Coursier-blanc-des-Prairies ! » répondit le chasseur de bisons.

En effet, le plus beau et le plus noble de ces nobles et beaux habitants des déserts, le plus fougueux parmi ces fougueux coursiers, le plus irrité et le plus agile de tous, était un cheval d’un blanc sans tache, comme la fleur de nénufar : c’était celui qu’on avait vainement poursuivi la veille.

Le superbe quadrupède aux yeux de feu s’élançait d’un bout à l’autre du corral, renversant, dans la colère dont il était transporté, ceux de ses compagnons d’infortune qui, se trouvant sur son passage, ne pouvaient éviter le choc terrible de son poitrail. Dans un large espace qui s’ouvrit autour de lui, l’animal bon-