Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/291

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Pepe ramassa, en faisant quelques pas dans l’eau, un objet qu’il montra au vieux chasseur.

« C’est un morceau d’une lanière de cuir qui retenait le canot à cette pierre, et que les coquins ont tranchée, au lieu de la dénouer, dit l’Espagnol ; et pendant que j’y suis, je vais pousser un peu plus loin sous cette voûte. Il me semble, à quelque distance d’ici, voir comme une traînée de lumière grisâtre trembler sur la surface de la rivière. »

Pepe s’avança avec précaution, dans l’eau jusqu’aux genoux, vers l’endroit où, en effet, un jour douteux semblait luire à l’extrémité du canal souterrain. Quelle ne fut pas sa surprise quand, ayant écarté des touffes de joncs et de roseaux, son regard plana sur un lac dont la configuration lui était connue ! C’était, en effet, le conduit qui communiquait sous les rochers avec le lac du val d’Or.

Pepe revint rendre compte au Canadien de sa découverte, quoiqu’elle fût à présent sans aucune importance. Bois-Rosé ne put s’empêcher cependant d’exhaler son chagrin, en pensant que le corps de l’Indien, en roulant du haut des rochers sous l’un de ses coups de feu, avait découvert à ses yeux cette voûte donnant sur le lac près d’eux, et lui avait indiqué providentiellement, sans qu’il eût l’idée d’en profiter, un chemin pour s’échapper avec Fabian et Pepe.

« Et là, acheva-t-il en se frappant le front, nous aurions trouvé ce canot pour sortir de ces montagnes en suivant tout simplement le cours de l’eau !

– Suivons-le donc à pied, s’écria Pepe, et nous marcherons en même temps sur les traces de ce métis maudit.

– Allons, profitons du moment où la faim n’a pas encore engourdi nos jambes et affaibli notre vue. Avant le coucher du soleil, nous aurons déjà fait passablement de chemin. »