Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/320

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encore si longtemps aux chocs qu’elles éprouvent et à la violence des eaux contre lesquelles elles ont à lutter. Du reste, leur légèreté même les préserve de mille accidents qui briseraient en pièces une embarcation plus forte, et permet, dans les endroits impraticables aux navigateurs, de les porter sans peine sur leurs épaules, pendant des journées entières de marche.

Ce fut dans un de ces canots que la petite troupe s’embarqua. Le Comanche poussa au large avec ses avirons, et la frêle machine ne tarda pas à suivre rapidement le fil de la rivière.

Rayon-Brûlant et le guerrier qui l’accompagnait dirigèrent le canot le long de la rive gauche, en rangeant la terre le plus près possible, pour se cacher sous l’ombre des arbres, qui déjà s’allongeait sur le fleuve.

« À quelle distance à peu près supposez-vous que nous soyons de la Fourche de la Rivière-Rouge ? demanda le Canadien, qui accusait encore de lenteur la rapidité de leur marche.

– En naviguant ainsi toute la nuit, nous serons demain à la Fourche-Rouge, répondit le Comanche, quand le soleil sera sur l’horizon à la même place que ce soir. »

C’était donc tout un jour et toute une nuit de navigation, en supposant qu’aucun obstacle n’arrêtât la marche de la petite troupe, ce qui n’était guère probable, entourés d’ennemis de tout genre, comme l’étaient les cinq voyageurs.

Bois-Rosé, tout en explorant de l’œil, ainsi que ses compagnons, les bords ombragés de la rivière qu’ils côtoyaient, repassait dans sa mémoire, pour calculer les chances qu’ils avaient de rejoindre le métis, toutes les particularités du récit de Rayon-Brûlant.

Quelques-unes d’entre elles ne lui paraissaient pas suffisamment claires ; puis le sort réservé à Fabian était pour lui un sujet d’inquiétude dévorant.

« Lequel de vos batteurs d’estrade, demanda le Cana-