dien au Comanche, a pénétré dans le camp de Main-Rouge ? »
L’Indien désigna de la tête le guerrier qui ramait à côté de lui.
« Ah ! s’écria le coureur des bois en tressaillant, que ne me le disiez-vous plus tôt ! Comanche, poursuivit-il en s’adressant au rameur d’une voix pleine d’émotion, vous avez vu le jeune guerrier du Sud, comme ils appellent mon pauvre Fabian ; vous l’avez vu, vous lui avez parlé ? Que faisait-il ? Quelle était sa contenance ? Tournait-il souvent les yeux vers l’horizon pour chercher dans les nuages le vol de l’Aigle des Montagnes-Neigeuses, et de celui qu’ils feraient mieux de nommer l’Aigle Moqueur ? Parlez, Comanche ; les oreilles d’un père sont ouvertes pour entendre ce qui se dira d’un fils bien-aimé. »
Mais à ce flot de questions le guerrier sauvage ne répondit rien ; il ne comprenait pas l’espagnol, et le dialecte comanche était inconnu au Canadien. Rayon-Brûlant transmit les demandes et traduisit les réponses.
« Le jeune guerrier du Sud, dit il, était calme et triste comme le crépuscule dans les montagnes, quand l’oiseau de nuit commence à chanter.
– Entendez-vous, Pepe ? s’écria le Canadien les yeux humides.
– Son visage, continua le traducteur, en répétant fidèlement ce qu’il entendait, était pâle comme un rayon de la lune sur un lac ; mais ses prunelles avaient l’éclat de la mouche à feu dans les herbes sombres des Prairies.
– Oui, oui, dit le Canadien ; quand vous voulez savoir si un homme est brave, ne regardez pas ses joues, regardez ses yeux.
– Mais, poursuivit le truchement, que signifiaient la pâleur des joues du jeune guerrier du Sud et le feu de ses yeux ? Que sa chair souffrait de la faim, mais que les tortures de ses entrailles n’atteignaient pas son âme.