L’âme d’un guerrier ne souffre jamais des maux de son corps. »
Le vieux chasseur avait trop vécu parmi les Indiens pour ne pas mettre en première ligne un courage à toute épreuve ; et un plaisir sauvage brillait dans ses prunelles en entendant l’Indien chanter les louanges de son enfant.
« Le jeune guerrier du Sud, reprit le narrateur en prêtant peut-être à Fabian ses propres impressions, ne cherchait pas à distinguer dans le ciel le vol des aigles, ses amis ; il regardait au dedans de lui, et les cris d’agonie des ennemis qu’il avait tués arrivaient à ses oreilles, et il souriait à la mort.
– Allez, Comanche, le jeune homme ne disait pas ce qu’il pensait. Il sait bien que son vieux Bois-Rosé… Et, continua le Canadien d’une voix qu’il s’efforçait en vain d’affermir, le Comanche sait-il… à quel moment… on avait fixé le supplice du jeune guerrier du Sud ?
– Au moment où le grand chef, l’Oiseau Noir, aura rejoint Sang-Mêlé à la Fourche-Rouge.
– Vous êtes fatigués tous deux ; laissez-nous ramer à notre tour, Pepe et moi, dit le Canadien les yeux enflammés ; l’aigle est sur la trace des vautours. »
Sous l’impulsion des deux nouveaux rameurs, le canot de peaux de buffle glissa plus rapidement sur la surface du fleuve.
Bois-Rosé se trouvait néanmoins soulagé d’un poids énorme ; il savait que Fabian vivait, que son supplice était différé jusqu’à la jonction de l’Oiseau-Noir et du métis ; il savait que la troupe du premier était derrière eux et qu’il arriverait avant elle à la Fourche-Rouge. Cependant Sang-Mêlé pouvait changer son campement, ou n’y pas faire du moins un séjour assez long pour qu’on pût espérer l’y rencontrer et l’attaquer avec quelque chance de réussite.
« La Fourche-Rouge est-elle éloignée de l’endroit que