Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/343

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simoun apporte des sauterelles, ai-je tort ? demandait à Pepe le Canadien irrité de ce nouvel obstacle.

– Si je ne me trompe, répondit l’Espagnol, quoique je ne nie pas que ces coquins ne soient comme l’une des plaies d’Égypte, nous ne devons pas être étonnés de voir ceux-ci sur nos traces. Regardez là-bas ce cheval pie dont on peut distinguer la couleur malgré les ténèbres, et qui bondit sous son cavalier ; ne vous semble-t-il pas l’avoir déjà vu galoper autour de l’îlot de la rivière de Gila ?

– J’ai de terribles motifs pour me le rappeler, ajouta Gayferos ; l’Indien qui le premier m’a lancé son lazo autour du corps et m’a jeté à bas de mon cheval en montait un exactement semblable à celui-là.

– Et cet autre, reprit le carabinier, ne jurerait-on pas, à la crinière de bison dont sa tête semble être ornée, que c’est l’Indien que nous vîmes en sentinelle sur le bord de la rivière, quand notre îlot flottant en descendait le cours ? Ah ! c’est là une des circonstances de notre vie aventureuse dont je me souviendrai longtemps. Il y a, à mon avis, cent à parier contre un que les coquins sont les mêmes qui nous ont assiégés, et qu’ils ont été reconnaître nos traces à l’endroit où nous avons pris pied pour gagner le val d’Or.

– Je ne dis pas non, » reprit en soupirant Bois-Rosé, à qui ces dernières circonstances, mentionnées par le gambusino scalpé ainsi que par l’Espagnol, rappelaient plus amèrement encore la parole de Fabian.

Les trois quarts de la distance jusqu’aux bouquets d’arbres étaient à peu près franchis. Le canot se trouvait, par conséquent, plus rapproché des Indiens, qui achevaient aussi de leur côté de parcourir leur demi-cercle, et, pour peu que les nouvelles armes des trois blancs eussent une assez bonne portée, on pouvait espérer démonter un ou deux des cavaliers de la plaine.

Le canot, quoique vigoureusement poussé par l’im-