Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/360

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le Comanche, après s’être un instant orienté, s’avança le premier d’un pas ferme, escorté des deux guerriers de sa nation et des trois blancs qui venaient ensuite.

Les rayons obliques de la lune à travers les arbres éclairaient suffisamment pour rendre la marche des voyageurs aussi rapide que le permettait la prudence. Il était nécessaire, en effet, de faire des haltes répétées pour interroger de l’œil et de l’oreille le silence et la profondeur des bois, où des éclaireurs ennemis pouvaient être disséminés. Ce n’était donc qu’après ces temps d’arrêt que la petite troupe reprenait sa marche interrompue.

Parfois aussi les mousses parasites des cèdres et les longues tiges de la vigne vierge s’enchevêtraient si étroitement dans les branches des arbres et autour de leurs troncs, qu’elles obstruaient le passage et forçaient à faire de longs détours ; il fallait ensuite s’arrêter pour s’orienter de nouveau, afin de ne pas trop s’éloigner de la rivière.

Au bout d’une heure environ, pendant laquelle les voyageurs n’avaient pas fait beaucoup de chemin, en raison de tous ces obstacles, quelques bouffées d’air plus frais, qui arrivaient de temps à autre à travers les arbres, annoncèrent que le fleuve n’était plus loin. Bientôt, en écoutant attentivement, on put entendre le grondement sourd des eaux resserrées dans le passage étroit que leur laissait le rapprochement des rives.

Alors l’Indien fit suivre à la petite troupe une ligne droite, en ayant soin de prêter la joue de distance en distance au souffle du vent humide et l’oreille au bruit des eaux, pour ne pas dévier de la direction qu’il indiquait.

Quand le jeune Comanche eut marché quelque temps ainsi, il cessa d’interroger les fraîches émanations de la rivière, pour chercher des traces au milieu des larges plaques de lumière blanche que la lune laissait tom-