Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/401

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Un regard de colère de son fils empêcha l’Américain de continuer.

« J’accepte, ma foi, reprit-il ; car mes paupières sont lourdes comme les portières de cuir de ma hutte, et je dormirai près du prisonnier, en ayant soin d’ajouter une courroie de plus à celles dont je me suis complu à l’orner. »

Conformément aux ordres du métis, la pirogue, au fond de laquelle on avait jeté Fabian pieds et poings liés, gagna le bord opposé de la rivière avec trois autres rameurs. Main-Rouge transporta, en chancelant un peu sur ses jambes, le jeune captif derrière un groupe épais d’arbres et d’arbustes, à quelques pas de la rive. Un des Indiens se coucha comme lui à côté de Fabian, et quand les deux autres maraudeurs traversèrent de nouveau le fleuve pour rejoindre le métis, il eût été impossible de deviner que trois hommes étaient cachés à l’ombre des cotonniers.

Cette précaution prise en cas d’événement, la pirogue fut échouée sur le rivage et transportée, non sans peine, par toute la troupe, au milieu des herbes, dont on la couvrit soigneusement, de manière à la cacher à tous les yeux.

Sang-Mêlé mit ensuite deux Indiens en sentinelle sur les bords de la rivière, à peu près en face de l’endroit où Fabian était resté sous la garde du renégat, puis il dispersa les autres de distance en distance dans la plaine, avec ordre de surveiller l’arrivée des alliés qu’il attendait. Il s’occupa ensuite de l’exécution du plan qu’il avait combiné.

Le métis commença par ôter les rubans rouges qui ornaient ses cheveux ; puis il fit disparaître, en plongeant sa figure dans l’eau du fleuve, les peintures dont il l’avait enjolivée à la mode indienne ; il se dépouilla ensuite de sa chemise de drap écarlate et quitta ses guêtres de cuir ornées de grelots, ne gardant de son pre-