Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/434

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Pendant qu’Encinas caressait Oso, revenu vers lui, et rattachait à son collier sa courroie de buffle, Pepe, sans avoir égard aux avis du Canadien, et impatient de voir par lui-même, s’était coulé jusque derrière lui.

Les dernières herbes du sentier venaient mourir sur un terrain pierreux, et à vingt-cinq pas environ de la frange clair-semée qu’elles formaient, le bois commençait. Mais au lieu de présenter à l’œil, de ce côté comme de tous les autres, un rempart insurmontable de lianes, de troncs pressés et de branches entrelacées, le sol, primitivement creusé par les eaux, laissait entre les arbres un passage de quatre pieds de largeur. De chaque côté de cette espèce de ravine s’élevait un talus à pans droits, dont l’intervalle était rempli de troncs d’arbres et de branchages fraîchement coupés

« C’est par ce passage que les coquins sont entrés à cheval comme par une porte cochère, dit Pepe.

– Ne perdons pas notre temps ici, Pepe, et, puisque vous voici, glissons-nous chacun d’un côté de cette ouverture pour voir ce que fait l’ennemi : où est Fabian, et par quel endroit il faut commencer l’attaque. Encinas, tâchez, s’il est possible, que votre chien soit muet ; sa voix pourrait nous attirer, à vous comme à nous, le désagrément d’un morceau de plomb dans le corps ; ou mieux encore, courez avertir Rayon-Brûlant et don Augustin que nous avons trouvé le passage vers l’ennemi, puis foncez hardiment à la tête des plus braves ; nous allons éclairer votre marche, mon compagnon et moi. »

Encinas goûta cet avis et s’éloigna promptement pour remplir sa mission.

À droite et à gauche, à vingt pas du chemin creux, la lisière du bois reprenait toute son épaisseur, et les deux chasseurs n’hésitèrent pas à s’y engager, chacun de son côté, pour exécuter leur projet. Telle était la vigueur de la végétation qu’à peine leurs yeux pouvaient-ils dis-