Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/439

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sarita ne pouvaient soupçonner la présence l’un de l’autre dans cet étroit espace, et encore moins s’apercevoir réciproquement.

Tel était l’aspect de la clairière et des abords de l’Étang-des-Castors, lorsque Sang-Mêlé se dirigea vers la hutte, à la porte de laquelle veillait son père. Un court et rapide dialogue en anglais eut lieu entre les deux pirates. Alors Main-Rouge se leva, et, après une horrible menace dont il est facile de deviner le sens, faite à Rosarita, qui en comprit la portée et resta plus pâle, plus tremblante, et plus immobile que jamais, le vieux renégat suivit le métis.

Tous deux s’avancèrent à l’extrémité de la clairière la plus voisine de Rayon-Brûlant et la plus éloignée de Bois-Rosé, et s’ouvrirent un passage à travers les arbres ; après quelques pas les deux bandits s’arrêtèrent, invisibles à la fois aux leurs et à l’ennemi, et la voix de Sang-Mêlé s’éleva du milieu des arbres :

« Que les oreilles du brave guerrier que les Apaches appelaient le Nuage-Sombre, et que les Comanches nomment Rayon-Brûlant, soient ouvertes, cria le métis.

– Rayon-Brûlant n’a jamais connu le nuage sombre, répondit le jeune guerrier ; que lui veut-on, et qui l’appelle ? »

Sang-Mêlé avait prononcé ces paroles en un dialecte apache si pur, que Rayon-Brûlant avait cru entendre un des compatriotes dont il répudiait même jusqu’au souvenir.

« C’est moi, Sang-Mêlé, reprit le métis, qui veux presser la main d’un ami.

– Si c’est là tout ce que veut El-Mestizo, qu’il se taise ; sa voix m’est odieuse comme le sifflement ou le bruit des sonnettes du serpent, répondit la voix de Rayon-Brûlant.

– Ce n’est pas tout : El-Mestizo tient en son pouvoir