Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/448

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dits que le jeune Comanche avait osé attaquer seul de front, et à qui, aux dépens de sa vie peut-être, il avait arraché Rosarita. Mais il y avait devant les deux pirates un homme qu’aucun ennemi, quel qu’il fût, ne pouvait intimider longtemps : c’était Pepe, qui le premier avait perçu l’arrivée soudaine du renégat américain et de son fils.

« Volte-face, Bois-Rosé ! » cria l’Espagnol.

Bois-Rosé, en se retournant promptement, se trouva face à face avec ses deux mortels ennemis.

Pendant ce temps, le champ de bataille s’était éclairci. La mort de l’Oiseau-Noir, les attaques furieuses du Canadien, de Fabian et de l’Espagnol, les efforts des vaqueros, encouragés par leur maître à reconquérir sa fille, tout avait contribué à répandre de nouveau la terreur parmi les Indiens. La présence inopinée des deux redoutables alliés des Apaches, Main-Rouge et Sang-Mêlé, était trop tardive. La plupart avaient fui, laissant leurs morts sur l’herbe ensanglantée de la clairière, et les vaqueros, en grand nombre aussi, l’hacendero une fois disparu avec son précieux fardeau, s’étaient mis à la poursuite des fuyards.

Vingt-sept cadavres, dont dix-huit Indiens, étaient couchés sur le sol ; quelques groupes acharnés combattaient seuls encore au nombre d’une vingtaine d’hommes à peu près, quand, pour la troisième fois de leur vie, le Canadien et Pepe se rencontraient presque corps à corps, avec les deux pirates des Prairies.

Encore enivré de l’ardeur du combat, Bois-Rosé, la hache levée, se précipita sur le métis ; celui-ci était le plus jeune et le plus fort, et il appartenait de droit au Canadien. Mais, aussi vigoureux que le coureur des bois lui-même, Sang-Mêlé était plus agile. Le métis évita le coup, et il allait s’élancer pour saisir Bois-Rosé de ses bras nerveux, quand, à l’aspect de Wilson qui rechargeait sa carabine, il changea tout à coup de projet, et s’élança jusqu’à l’extrémité de la clairière.