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Castors, Fabian ne prit aucune part à la conversation des deux chasseurs. Une profonde et sombre mélancolie avait remplacé dans son âme la tristesse calme qu’il avait ressentie jusqu’alors ; c’est qu’un moment l’espoir lui était revenu, et qu’il fallait de nouveau chercher à éteindre le feu qui s’était rallumé plus ardent que jamais au fond de son cœur.

Plus que jamais aussi Fabian se crut dédaigné par Rosarita. La douleur que lui causait son départ subit ne lui permettait pas de se rendre compte de l’impossibilité où la jeune fille s’était trouvée de résister aux ordres de son père ; il était loin de croire qu’en quittant si précipitamment le Lac-aux-Bisons, elle emportait la douce certitude, maintenant qu’elle le savait vivant, de le voir arriver presque sur ses pas à l’hacienda. Dans son profond chagrin, le cœur ulcéré par ses injustes soupçons, il résolut de nouveau d’aller avec ses deux compagnons enfouir dans le fond des déserts sa passion désormais sans espoir.

La nuit était venue, lorsque, après le triste et inutile voyage qu’il venait de faire, Fabian se retrouva près de l’Étang-des-Castors.

Le jeune Comanche était revenu à lui. Il put reconnaître Encinas et lui presser la main ; puis il se rendormit d’un sommeil assez calme. Sir Frederick fit dresser sa tente au-dessus du blessé pour le mettre à l’abri de la fraîcheur de la nuit ; chacun ensuite s’étendit auprès d’un large feu pour se livrer au repos après les rudes fatigues de la journée.

Aucun accident ne marqua le cours de cette nuit, si ce n’est le tumulte passager causé par le cheval blanc blessé par le chasseur américain. Incapable de supporter plus longtemps le joug de la servitude, le noble animal se débattait et redoublait d’efforts pour rompre les liens qui le retenaient captif. Au bruit qu’il faisait, Wilson accourut. Il était trop tard, l’agile enfant des forêts avait