Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/466

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serra la main de tous les assistants, se mit en selle, et les deux taciturnes compagnons de route eurent bientôt disparu dans le chemin creux derrière les arbres.

Bien qu’on n’ait plus entendu parler d’eux, nous nous plaisons à croire que la sinistre prédiction du chasseur de bisons ne s’accomplit pas. Nous aimons mieux penser que, si l’Anglais parlait peu, il écrivait encore moins ; puis, eût-il écrit, le service des postes n’est pas encore parfaitement réglé dans les déserts.

L’état du jeune Comanche, déjà plus rassurant la veille, s’était encore amélioré vers le matin. Lorsque le Canadien leva le premier appareil mis sur ses blessures, l’aspect qu’elles présentaient était assez satisfaisant pour que, à défaut de la sonde, l’œil en tirât la conclusion qu’aucune partie vitale n’était lésée, et le retour graduel des forces de l’Indien confirmait cette supposition. Ce n’était que le lendemain cependant qu’on pouvait espérer pouvoir essayer de le transporter par eau jusqu’au village des Comanches, situé sur les bords du fleuve, dans l’État du Texas.

À cet effet, les trois guerriers de Rayon-Brûlant se mirent en quête le long de la rivière. Le canot de peaux de buffle qui les avait amenés avait disparu, entraîné en dérive par le courant ; mais la pirogue indienne, plus pesante, s’était échouée parmi les roseaux, et les Comanches ne regrettèrent pas leur fragile embarcation, en échange de la barque solide et rapide à la fois dont ils s’emparèrent.

Le point le plus important restait à régler. Quelle direction allait suivre le trio de chasseurs ? Allaient-ils accompagner à son village le guerrier blessé, à qui ils étaient redevables de tant de services ? La dernière et terrible épreuve par laquelle ils venaient de passer avait-elle changé les dispositions de Fabian ? Le Canadien devait-il dissuader son fils de continuer avec eux cette vie de dangers incessants, si fertile en angoisses