Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/474

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mon maître attend son retour pour conclure le mariage de doña Rosario, sa fille, une belle et charmante personne, avec le sénateur don Vicente Tragaduros. Les mois se sont écoulés, et, comme l’hacienda n’est pas sur la grande route d’Arispe à Tubac, et que nous ne pouvons interroger personne au sujet de cette déplorable expédition, don Augustin a fini par m’envoyer ici pour en avoir des nouvelles. Quand il aura la certitude que don Estévan ne doit plus revenir, comme les jeunes filles ne trouvent pas toujours des sénateurs au fond des déserts, comme les sénateurs n’ont pas tant qu’ils en veulent des dots de deux cent mille piastres…

– Caramba ! c’est un beau chiffre.

– Comme vous dites, reprit le majordome ; le mariage projeté aura lieu à la satisfaction mutuelle des deux parties. Tel est le sujet de notre venue à Tubac. Si donc vous pouvez m’amener celui que vous dites être l’unique survivant de l’expédition, nous apprendrons peut-être de lui ce que nous avons intérêt à savoir. »

La conversation en était là, quand, à quelque distance de la maison où elle avait lieu, un homme passait la tête baissée.

« Tenez, dit l’un des officieux en désignant du doigt l’homme en question, voilà précisément votre unique survivant.

– En effet, c’est un homme dont les allures sont assez mystérieuses, ajouta l’hôte. Depuis quelques jours il ne fait qu’aller et venir d’un endroit à un autre, sans confier à personne le but ou le motif de ses courses. S’il vous plaît, nous l’interrogerons.

– Hé ! l’ami, s’écria un des curieux, venez par ici, voilà un cavalier qui désire vous voir et vous parler. »

L’inconnu mystérieux s’approcha.

« Seigneur cavalier, lui dit courtoisement le majordome, ce n’est pas une vaine curiosité qui me pousse à vous interroger, mais le juste souci qu’inspire au maître