Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/48

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gloutir, leurs cris aigus se mêlaient aux grondements lointains des collines.

Après le premier mouvement de surprise causé par un spectacle auquel tous étaient si loin de s’attendre, Fabian répéta :

« Qu’avez-vous à répondre pour votre défense ? »

Une lutte violente entre sa conscience et l’orgueil eut lieu dans l’âme de Mediana.

L’orgueil l’emporta.

« Rien, répondit don Antonio.

– Rien ! reprit Fabian ; mais vous ne comprenez peut-être pas l’horrible devoir qui me reste à remplir ?

– Je le comprends.

– Et moi, s’écria Fabian d’une voix forte, je saurai l’accomplir ; et cependant, quoique le sang de ma mère crie vengeance, daignez vous disculper, et je bénirai vos paroles. Jurez-moi, par le nom de Mediana que nous portons tous deux, par votre honneur, par le salut de votre âme, que vous n’êtes pas coupable, et je serai trop heureux de vous croire. »

Puis, sous le poids d’une douloureuse angoisse, Fabian attendit la réponse de Mediana.

Mais inflexible et sombre comme l’archange déchu, Mediana garda le silence.

En ce moment, Diaz s’avança vers les juges et l’accusé.

« J’ai écouté, dit-il, écouté avec une attention profonde l’accusation portée contre don Estévan de Arechiza, que je savais être aussi le duc de l’Armada. Puis-je exprimer librement ici ce que je pense ?

– Parlez, répondit Fabian.

– Un point me paraît douteux. J’ignore si le crime qu’on reproche à ce noble cavalier a été commis par lui ; mais, en l’admettant, avez-vous mandat pour le juger ? D’après les lois de nos frontières, où les tribunaux ne peuvent siéger, il n’y a que les plus proches parents