Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/481

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Doña Rosarita ne put entièrement étouffer un soupir ; peut-être attendait-elle un nom.

Gayferos continua à raconter les divers faits que le lecteur connaît. Arrivé à la disparition de Fabian de Mediana, évitant toutefois, par un sentiment de délicatesse, de parler de Main-Rouge et de Sang-Mêlé : « Oui, madame, s’écria-t-il, le pauvre jeune homme avait été pris par les Indiens, et son supplice devait venger la mort des leurs. »

À cet endroit du récit les joues de Rosarita se couvrirent d’une pâleur mortelle.

« Eh bien, ce jeune homme, interrompit l’hacendero, que cette triste catastrophe émouvait presque à l’égal de sa fille, qu’est-il devenu ? »

Rosarita, dont la voix s’était éteinte au récit du gambusino, paya d’un regard de tendre reconnaissance la sollicitude que témoignait son père pour ce jeune homme auquel elle s’intéressait si vivement en dépit d’elle-même.

Gayferos dissimula un regard de joie, et, s’abstenant encore avec la même délicatesse de faire la moindre allusion à la sanglante action de la vallée de la Fourche, il reprit ainsi :

« Trois jours et trois nuits se passèrent dans d’horribles angoisses mêlées de quelques faibles lueurs d’espérance. Enfin, le matin du quatrième jour, nous pûmes tomber à l’improviste sur les ravisseurs sanguinaires, et, après une lutte acharnée, le guerrier géant put reconquérir sain et sauf et presser sur son cœur celui qu’il nommait son enfant bien-aimé.

– Grâce à Dieu ! » s’écria l’hacendero avec un soupir de soulagement.

Rosarita garda le silence, mais son teint qui se ranima tout à coup témoignait assez tout le plaisir qu’elle éprouvait. Un joyeux sourire s’échappa gracieusement de ses lèvres aux dernières paroles du gambusino.

Nous devons interrompre un instant le récit de Gayfe-