Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/51

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le secret désir de son cœur lui permissent de recourir.

« C’est vrai, dit-il, cet homme est de mon sang ; je ne saurais le nier sans souiller mes lèvres d’un mensonge. Le mensonge est fils de la lâcheté. »

Diaz inclina la tête, regagna sa place et ne dit plus rien.

« Vous l’avez entendu, dit Fabian, je suis bien le fils de cette femme assassinée par l’homme ici présent. J’ai donc le droit de la venger. Maintenant, que dit la loi du désert ?

– Œil pour œil, fit Bois-Rosé.

– Dent pour dent, ajouta Pepe.

— Sang pour sang, acheva Fabian ; la mort pour la mort ! »

Puis il se leva, et s’adressant à don Antonio en accentuant lentement ses paroles : « Vous avez versé le sang et donné la mort ; il vous sera fait ce que vous avez fait aux autres : c’est Dieu qui l’a dit et qui le veut. »

Fabian tira son poignard du fourreau ; le soleil versait les flots de sa lumière matinale sur le désert, et les objets projetaient au loin leur ombre.

Un vif éclair jaillit de la lame nue entre les mains du plus jeune des deux Mediana.

Fabian en enfonça la pointe dans le sable.

L’ombre du poignard dépassait sa longueur.

« Le soleil, s’écria-t-il, va mesurer les instants qui vous restent à vivre. Quand cette ombre aura disparu, vous comparaîtrez devant Dieu, et ma mère sera vengée ! »

Un silence de mort succéda aux dernières paroles de Fabian, qui, sous le poids d’émotions poignantes long temps contenues, se laissa tomber plutôt qu’il ne s’assit sur la pierre tumulaire.

Bois-Rosé et Pepe étaient restés assis ; juges et condamné, tous étaient immobiles…

Diaz comprit alors que tout était fini ; il ne voulut pas assister à l’exécution de la sentence.