Page:Gabriel Ferry - Le coureur des bois, Tome II, 1884.djvu/71

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ment ; et jetant au monceau d’or qu’il avait amassé sur sa couverture un regard de tendresse passionnée, il s’achemina vers le sommet de la pyramide.

Il était à peine arrivé que, sur l’invitation de Pepe, Fabian et Bois-Rosé commençaient à gravir l’escarpement de l’autre côté.

« Nul ne peut éviter son sort, dit Pepe à Fabian, et je vous avais bien prévenu que le drôle ne sourcillerait pas. Quoi qu’il en soit, rappelez-vous que vous avez juré de venger la mort de votre père adoptif, et que dans ces déserts vous devez faire honte à la justice des villes qui tolère l’impunité. Avec de pareils coquins, l’indulgence est un crime envers la société. Bois-Rosé, j’aurai besoin de l’aide de vos bras. »

Le chasseur canadien consulta du regard celui pour qui son dévouement aveugle ne connaissait pas de bornes.

« Marcos Arellanos a demandé grâce et il ne l’a pas obtenue, dit Fabian dont les incertitudes avaient cessé ; qu’à celui-là aussi il soit fait ce qu’il a fait aux autres. »

Et ces trois hommes inexorables s’assirent solennellement sur le sommet de la pyramide, où Cuchillo les attendait déjà. À la vue de la contenance sévère de ceux qu’il avait intérieurement tant de raisons de redouter, Cuchillo sentit renaître toutes ses appréhensions. Il essaya cependant de reprendre son assurance.

« Voyez-vous ?… » dit-il en montrant derrière la nappe d’eau, dont l’imposant fracas grondait à leurs oreilles, l’endroit où jusqu’alors le bloc d’or avait jeté ses éblouissantes lueurs et dont la trace seule restait au flanc du rocher.

L’œil avide du bandit en eut bientôt constaté l’absence, et il jeta un cri de rage aussitôt étouffé.

Mais les yeux de ses juges ne se détournèrent pas dans la direction qu’il avait indiquée. Fabian se leva