Page:Gagnebin - Petite Nell, 1902.djvu/82

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Lorsqu’il fait mauvais temps, nous nous disons pour nous consoler, que le beau temps reviendra, que le soleil se fera de nouveau radieux dans l’azur du ciel ; mais lorsqu’il fait beau, nous essayons de nous tromper et nous ne voulons plus croire que le soleil nous voilera de nouveau sa face.

Pour Petite Nell, les beaux jours, avec ses amis, n’allaient prendre fin que pour recommencer, plus beaux encore, auprès de son frère. Le rêve de sa vie allait enfin se réaliser, elle en tenait la preuve dans sa main, sur cette petite feuille de papier, où n’étaient tracées que quelques lignes seulement.

Oui, elle était bien heureuse, Petite Nell, son frère avait enfin pris possession de son brevet d’ingénieur, et leur vie, cette vie à deux, après laquelle elle avait tant soupiré, allait enfin commencer. Elle était bien heureuse, et pourtant elle apprenait, en ce moment, que dans ce monde, la réalisation de notre rêve de bonheur ne s’obtient, le plus souvent, qu’au prix d’un sacrifice, et ce sacrifice, malgré sa joie, lui déchirait le cœur ; bientôt, les jours passés avec sœur Hélène, le docteur, la vieille Gritli, ne seraient plus qu’un souvenir.

— Chérie, nous voulons nous réjouir, nous voulons être raisonnables.

Mais, tout en disant ces mots, sœur Hélène se montrait très peu raisonnable, et les larmes coulaient une à une sur ses joues pâles, sans qu’elle pût les arrêter.

— Mais… c’est ce que je ne peux pas, s’écria Petite Nell, je ne peux pas vous laisser seule, juste au mo-