tu as cent fois raison, et qu’il faut être aveugle ou de mauvaise foi pour ne point reconnaître que c’est la vérité.
Je remarquai en cet instant que M. le curé jetait à M. Moutonnet un regard sévère qui voulait dire : Comment laissez-vous votre servante parler ainsi devant le monde ?
Alors, M. Moutonnet dit à la Françoise :
— Voyons, Françoise, laissez-nous.
— Ah ! dis-je, la vérité ne l’emportera définitivement que lorsque les femmes viendront à notre aide. Si elles sont plus terribles que nous dans le mal, elles sont aussi plus dévouées et plus ardentes pour le bien. Et si une fois, dis-je en regardant malignement M. le curé, elles parviennent à descendre des genoux de l’Eglise, elles montreront un esprit plus juste et plus prompt à saisir les vérités. Merci, Françoise, d’avoir osé me soutenir devant tout le monde.
Mais il me vint un autre appui sur lequel je ne comptais guère, c’était le beau-père de M. Moutonnet, qu’on appelle à Neubourg le père Sergent.
C’est un soldat du premier empire, un vieux de la vieille, comme on dit, un dur-à-cuire, qui a fait toutes les campagnes du Ier Napoléon. Il entra dans la salle à manger au moment où la Françoise en sortait. On le regardait comme en enfance, car il avait plus de quatre-vingts ans.