Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/22

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une tenue modeste, c’est-à-dire compassée, parlaient à demi-voix, connaissaient un peu d’arithmétique, de géographie, un peu d’histoire profane d’après le père Loriquet, beaucoup d’histoire sainte et de catéchisme, tapotaient un quadrille, solfiaient un cantique, brodaient admirablement une chasuble, possédaient en un mot de ces petits talents dits d’agrément juste ce qu’il en faut pour obtenir dans le monde la réputation de jeunes personnes accomplies.

Lorsque Mlle Bathilde s’élevait contre cet enseignement, Mme Borel lui répondait d’un ton sec :

« Croyez-vous que je veuille faire de mes filles des voltairiennes ou des socialistes ? »

M. Borel aurait désiré que son fils Maxime continuât son industrie et profitât du capital de considération que lui-même s’était acquis parmi ses concitoyens. Mais Maxime, au collége des Jésuites, s’était lié avec des jeunes gens de famille noble qui lui avaient communiqué des idées de grandeur. Il voulut entrer dans la diplomatie ; il obtint donc d’aller à Paris pour y faire des études spéciales.

À Paris, Maxime, au lieu de viser au ministère des affaires étrangères, se fit admettre dans les clubs de la fashion ; au lieu d’étudier les langues orientales, il ne cultiva guère que cette sorte d’argot qui est la langue du quartier Bréda.

Comme la pension fournie par son père ne lui suffisait pas, il emprunta. Mme Borel, confiante dans l’éducation religieuse qu’avait reçue Maxime, croyait à la vertu de son fils comme à un article de foi. Quand elle acquit la preuve qu’il avait dépensé trois cent mille francs en cinq ans, et perdu son innocence baptismale