Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/73

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Cette explosion de douleur le surprit et le déconcerta. Il jeta sa cigarette avec impatience.

« Il faut que je la calme et que je la renvoie, » pensa-t-il.

Il approcha son fauteuil de Geneviève, et lui prenant les mains ;

« Voyons, voyons, mon enfant, dit-il avec un ton de caresse, pourquoi ce chagrin, pourquoi douter de mon affection ? Si vous saviez combien vous occupez ma pensée, et combien je suis privé moi-même de ne plus vous voir ! Ne vous avais-je pas prévenue que mes affaires me retiendraient pendant quelque temps éloigné de vous ? Mais, vilaine enfant gâtée, vous ne tenez aucun compte des affaires. »

Geneviève releva vers lui son visage encore humide, mais rasséréné.

« Vous m’aimez encore ! Bien vrai ? dit-elle avec un sourire attendri. Et moi qui vous accusais ! Ah ! sans doute, j’avais tort de m’inquiéter, car vous êtes bon. C’est que je suis seule, voyez-vous, toute seule, sans autre distraction que votre amour ; et tout le jour, et toute la nuit, je pense à vous. Et c’est bien long, bien long, quinze jours sans vous voir. »

Lionel jugea qu’il l’avait trop consolée. Il retira son fauteuil, reprit sa première attitude et dit :

« Maintenant, mon enfant, causons raisonnablement. Je vous parlais de mes affaires. Je vais vous donner une grande preuve de confiance, à condition toutefois que vous me garderez le secret. Vous me croyez riche parce que vous me voyez dans un riche appartement avec une mise élégante. Eh bien ! ma chère enfant, ce luxe couvre une profonde misère. J’ai cent mille francs de dettes, et