Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/74

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parfois j’éprouve de très-graves embarras. Car j’ai un rang à soutenir, une position à me créer. Vous le voyez bien, il n’y a pas de ma faute si je ne vais pas vous voir. Vous êtes jeune, vous aimez la gaieté. Je craindrais de vous apporter un visage fatigué et morose.

— Oh ! mon Lionel, s’écria Geneviève en tombant à ses genoux et en l’entourant de ses bras, je vous aime assez pour partager vos ennuis, vos inquiétudes. Et si vous êtes pauvre, tant mieux, cela vous rapproche de moi. Oh ! que je vous aime mieux ainsi ! Je me disais souvent que, riche et beau, jamais vous ne pourriez aimer comme elle vous aime, la fille de Gendoux le fileur ; mais aujourd’hui j’ai un peu d’espoir. Quelle bonne nouvelle vous me donnez là !

— Décidément, pensa Lionel, c’est un vrai crampon, cette fille-là.

— Petite égoïste, va, fit-il à haute voix en frappant à petits coups sur la tête de Geneviève.

— Oui, c’est vrai, je suis égoïste de te vouloir pour moi seule.

— Je ne vous ai pas encore tout dit, reprit Lionel. J’ai souscrit des lettres de change, et je suis menacé de la prison. Mes créanciers me poursuivent, et voilà pourquoi je ne puis sortir.

— De la prison ! s’écria Geneviève, qui pâlit. Ah ! alors, que ne venez-vous chez moi ; je vous cacherais, et personne ne viendrait jamais vous y chercher.

— Tu es charmante, mon enfant, mais c’est impossible, répondit-il d’un ton qui n’admettait pas l’insistance. Voyons, raconte-moi maintenant ce que tu fais. Qu’est-ce que ce paquet ?

— C’est de l’ouvrage que je reporte à l’atelier.