Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/77

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à la dernière mode, elle ferait sensation ; mais pour cela il faudrait cent mille francs de rente.

« Il faudrait aussi l’aimer un peu. Et, ma foi ! depuis quelque temps elle est si larmoyante… Non, elle n’aura jamais l’esprit et la désinvolture de ces femmes-là. Elle a trop de cœur. Elle prend l’amour au sérieux. Je sais bien qu’on pourrait la corriger de cela. C’est charmant l’amour quand on le partage ; mais quand on n’aime plus, brrrr… que c’est assommant ! Et puis les parents qui sont par derrière, s’ils allaient apprendre que c’est moi… Il faut rompre au plus tôt. D’ailleurs, dans ma position critique, je n’ai plus qu’une ressource, me marier.

« Béatrix n’est pas, certes, l’idéal de mes rêves. C’est un peu sec, guindé, puéril, une élève du Sacré-Cœur confite en bigoterie. Ah ! si elle avait seulement les yeux de Madeleine ! Qu’y a-t-il donc dans ces yeux-là qu’ils vous prennent ainsi ! Quel regard caressant et fier, ouvert et profond ! Quel magnétisme il projette ! Comme il vous enveloppe, comme il vous saisit ! il semble qu’on s’y abîme. Est-ce que Maxime… Je saurai cela. Allons, allons, à quoi vais-je penser ? Béatrix aura un million de dot, et pour le moment cela doit me suffire.

« Ah çà ! que fait donc Lucrèce ? il est deux heures et demie, dit-il en arrangeant ses cheveux devant la glace. Lucrèce !… ajouta-t-il avec une expression de fatigue. Il faut que je me marie, ne serait-ce que pour me délivrer de cette servitude. Mais si je lui recommandais Geneviève ! Elle la placerait peut-être chez sa couturière. Oui, mais elle est jalouse… Nous verrons. »