Page:Gagneur - Le Calvaire des femmes 1.djvu/79

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Mme Daubré avait trente-huit ans, et, sentant que son règne allait bientôt finir, elle redoublait de soins et de coquetterie pour le maintenir quelques années encore. Son amour pour Maxime, le dernier peut-être, était devenu presque une passion. Cependant elle avait adopté cette devise, que pour conserver sa beauté, il ne faut aimer, pleurer et rire qu’à moitié, trois choses, ajoutait-elle, qui plissent horriblement.

Comme son frère, nature très-mobile, elle portait la même ardeur dans la coquetterie, et montrait la même dureté de cœur quand l’amour s’éteignait. C’était le même goût pour le luxe et la même morgue aristocratique.

À Lille, il y a fort peu d’aristocratie. Elle est pauvre et d’autant plus entichée de ses titres de noblesse. Malgré son horreur pour la roture, à trente ans, Mlle de Lomas avait épousé M. Daubré. En philosophe elle avait jugé qu’un million vaut bien une particule.

Mme Daubré se montrait à Lille fort exigeante pour la composition de son salon ; mais à Paris elle prenait plus de latitude et allait dans toutes les maisons où elle pouvait trouver des admirateurs.

Elle avait rencontré dans le monde Maxime Borel, et par l’attrait des contrastes sans doute, elle s’était éprise de ce bouillant jeune homme, dont l’esprit sceptique et les façons de sportman l’avaient subjuguée.

Coquette même devant sa femme de chambre, Mme Daubré n’avait pas voulu paraître aux yeux de Madeleine sans avoir fait un bout de toilette.

Madeleine attendait anxieusement. C’était la première fois qu’elle se présentait en solliciteuse. Elle éprouvait au cœur cette angoisse qui rend les mains