Page:Gaillard - Le Royaume merveilleux, 1917.djvu/46

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Pardon s’exclama Lucien, lors de notre première guerre, vous aviez accordé ce que nous demandions et n’aviez qu’à nous laisser tranquilles. Si je m’insurge, et je le ferai toujours, c’est parce que vous formez un triumvirat qui prétend imposer ses vues par la force aux autres nations latines.

Peut-être un jour serez-vous heureux, quand on vous aura fait sentir ce que la doctrine de Monroë a d’excessif, de me trouver là prêt à défendre vos intérêts lésés.

Ah ! ce jour-là vous ne nous traiterez plus en sauvages mais en sauveurs ! Voulez-vous, demanda le président, que je m’entremette auprès de mes collègues du Chili et du Brésil pour amener un rapprochement et éviter une effusion de sang inutile ? Avec plaisir, monsieur le président, mais je crains bien que ce sera en vain. Avec ces pays, comme du reste avec le vôtre, il n’y a que la force qui compte.

Tant qu’ils n’auront pas essayé de nous battre, ils ne céderont pas. Sur ces entrefaites on annonça que le déjeuner était servi. Lucien prit place à la droite du Président et Linda, sa femme, à sa gauche. Les autres convives s’assirent selon leur rang protocolaire. Quand vint l’heure des toasts, le président se leva et dit : Messieurs, Mesdames : Je lève mon verre à la prospérité du royaume d’Araucanie et de l’empire, de ses souverains et de son peuple.

Lucien à son tour se leva et dit : Je vous invite à lever vos verres à la prospérité de l’Argentine et à la prompte constitution de tous les peuples de l’Amérique latine, en une Fédération où chaque état sera représenté selon ses forces.

Ce toast fut applaudi avec frénésie car beaucoup des convives voyaient en Lucien le futur régénérateur des peuples et le seul capable de contenir les appétits de la grande république du nord.

Dès le banquet terminé, Lucien et son épouse furent reconduits dans l’automobile présidentielle jusqu’à leur demeure. Le lendemain matin commença l’embarquement des troupes de Lucien vers Légia, il dura quatre jours.

Il ne resta à Buenos-Ayres que les 40.000 hommes de garnison avec 250 canons et 750 mitrailleuse. Tout le reste quitta l’Argentine.

Quand Lucien fut prêt à partir, le président de la République vint à nouveau le voir. Je vous apporte, dit-il, l’acte de paix rédigé en double. Veuillez y apposer votre signature. Lucien signa et conserva l’exemplaire qui lui revenait. En outre, dit le président, je vous annonce qu’en réponse à mes offres de médiation, le Chili et le Brésil ont décliné mes bons offices.

Je le regrette, répondit Lucien, mais je m’y attendais.

Le président de la république resta déjeuner avec lui.

Après le repas, il le reconduisit vers le hangar des dirigeables. Lucien, Linda et sa suite prirent place dans celui qui leur était destiné.