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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, XVI, xiv.

différences [secondaires] de l’espèce ; à celles d’espèce différente, d’après la quantité de substance qui se dissipe à travers les canaux d’écoulement et par suite de quoi les corps des animaux ont besoin d’aliments. En effet, si rien ne s’écoulait et n’était évacué, et si l’habitude du corps restait toujours la même, quelle serait l’utilité de la nourriture, quelle crainte aurait-on de la vieillesse et de la mort ? Puis donc que nous avons besoin d’aliments parce que nous perdons par l’évacuation, il faut que l’alimentation soit égale à la quantité de substance perdue. Or, il s’en écoule davantage des corps chauds, mous et assujettis à un mouvement perpétuel ou violent, et très-peu des corps froids, durs et soumis à une action modérée. En effet [eu égard aux qualités élémentaires], le froid condense, contracte, resserre les corps et empêche les déperditions ; la chaleur, au contraire, les raréfie, les fond, les exténue, les pousse à la sécrétion. Eu égard à la substance même, une partie dure et pierreuse est fixe, et n’est pas facilement mise en mouvement (mouvement organique) ; une partie humide et molle est promptement réduite en vapeur par la chaleur : elle se dissipe et s’exhale promptement. Ainsi, dans le poumon tout est prédisposé à l’évacuation, car il est très-mou, très-chaud et agité d’un mouvement continuel. Au contraire, les os se trouvent dans une condition entièrement opposée, car ils sont durs, froids, et la plupart du temps exempts de mouvement. Aussi leur substance est fixe et se résout difficilement. Ne vous étonnez donc pas si la nature a distribué à ces os des veines si petites qu’elles ne se distinguent pas nettement, même quand on les cherche sur un gros animal, ni si une très-grande veine (artère pulmonaire) qui part du cœur s’insère sur le poumon. La nature, équitable dans les autres dispositions, ne l’est pas moins dans celle-ci, envoyant aux unes et aux autres autant de parties de nourriture qu’elles se trouvaient en avoir besoin.

Je viens de mettre en regard deux parties ayant besoin, l’une d’aliments abondants, l’autre de très-peu d’aliments. Dans l’intervalle se placent toutes les autres parties, perdant par l’évacuation et ayant besoin de se nourrir les unes plus, les autres moins que ces dernières. Quelques-unes, en effet, bien que plus dures de substance, comme le cœur, consomment plus d’aliments par suite de leur température élevée ; d’autres, bien que plus molles, comme