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DES FACULTÉS ATTRACTIVE ET ALTÉRATRICE.

Érasistrate, outre qu’il ne sait rien de cela, montre peu de sagacité dans la division de son discours, en prétendant qu’il est sans utilité pour l’art de guérir de rechercher si c’est dans les aliments que la bile est contenue tout d’abord, ou si elle naît pendant leur élaboration dans l’estomac. Il aurait dû, certes, ajouter quelque détail sur sa production dans le foie et les veines, les anciens médecins et les anciens philosophes ayant déclaré que la bile était engendrée avec le sang dans ces organes. Mais quand dès le début on s’est égaré et détourné de la voie droite, on s’amuse nécessairement à de pareils bavardages, et de plus on néglige les recherches concernant les choses les plus nécessaires à l’art.

J’aurais donc du plaisir, arrivé à ce point du discours, à demander à ceux qui prétendent qu’Érasistrate pratiquait beaucoup les philosophes péripatéticiens, s’ils connaissent ce qui a été dit et démontré par Aristote, touchant le mélange dans nos corps du chaud, du froid, du sec et de l’humide ; s’ils savent que, suivant lui, le chaud est parmi ces quatre qualités élémentaires l’agent le plus puissant, que ceux des animaux qui sont naturellement plus chauds sont nécessairement des animaux pourvus de sang, et que ceux qui sont naturellement plus froids sont nécessairement des animaux privés de sang, lesquels conséquemment, pendant l’hiver, restent couchés, inactifs, sans mouvement, étendus dans des cavernes comme des cadavres.

Il a été parlé de la couleur du sang non-seulement par Aristote mais encore par Platon[1]. Pour nous maintenant, comme nous l’avons déjà dit précédemment, notre but n’est pas d’exposer ce que les anciens ont si bien démontré ; nous ne pourrions surpasser ces grands écrivains, ni par la pensée, ni par l’expression ; mais les assertions qu’ils ont laissées sans démonstration, comme évidentes par elles-mêmes et ne supposant pas qu’il se trouverait des sophistes assez dépravés pour en méconnaître la vérité, ou encore les questions entièrement omises par eux, voilà ce que nous jugeons convenable d’approfondir et de démontrer. Quant à la

  1. Arist. Hist. anim., III, xix (xiv, éd. Schneider) ; Platon, Timée, p. 80 e. — Bernard a publié à la suite de Psellus De lapidibus (p. 44), un fragment grec sous le titre : De colore sanguinis ex medicina Persarum.